La Dirndl, est la tenue féminine entre autres portée à l’occasion de la fête de la bière de Munich, l’Ocktoberfest. Sur 6 millions de visiteurs près de la moitié revêtent le Dirndl pour les femmes ou Lederhose pour les hommes. Cela représente, juste pour la Dirndl environ 1 million 500000 visiteuses qui la porte. Mais pas que !!!

Elle est aussi portée en Autriche, en Suisse et dans le Tyrol italien.

Mais d’où vient cette tenue  ? On pourrait légitimement penser qu’elle est une évolution du vêtement traditionnel porté par les paysannes bavaroises au XIX ème siècle. Or, il n’en est rien.

En aucun cas la Dirndl n’est un vêtement historique et ne peut être confondu avec un costume traditionnel régional.

Les origines de la Dirndl

La dirndl, si elle s’est inspirée à un moment du costume régional ne respecte aucuns des codes qui régissent le vêtement traditionnel (coupe, couleurs, accessoires….). Son évolution s’est fait parallèlement, plus au gré des modes et des propositions de création et de marketing.

Julia-AJulia Andrews-melodie-bonheur
D’après Simone Egger, spécialiste de la dirndl en Allemagne, le costume traditionnel bavarois aurait plus ressemblé à la tenue de Julia Andrews dans La mélodie du bonheur. (Le film se passe en fait en Autriche de l’ouest, à quelques kilomètres de la frontière allemande)

Dans les années 1870-1880, la Dirndl est un phénomène de mode essentiellement urbain. Les grandes bourgeoises des villes prenant villégiature dans les Alpes Bavaroises s’inspirent de la tenue des servantes.  Elles font créer par leurs couturières un vêtement “villageois” d’été, plus léger à porter et plus adapté aux vacances que les robes à la mode. (image à la une de l’article, Romy Schneider dans Sissi) Le dirndl représente en fait plus l’image que se faisaient les citadines du vêtement paysan que le mode de penser et la façon de se vêtir des femmes de la terre. Les robes que portaient les paysannes bavaroises à cette époque-là étaient plutôt austères.  Le décolleté est à peine esquissé, le jupon tombe jusqu’aux chevilles. Les couleurs sont sombres, les tissus grossiers, faits pour tenir chaud et durer.

Pendant la première guerre mondiale, restrictions budgétaires aidant, le dirndl eut beaucoup de succès. Il représentait une alternative bon marché au costume traditionnel souvent très cher.

La culotte de cuir des hommes ou Lederhöse, presque indissociable de la dirndl ne prit pas le même chemin. Tout d’abord vêtement de travail des paysans, elle a acquis ses lettres de noblesse auprès des rois bavarois.  Ceux-ci la portèrent, façon symbolique de se rapprocher de leur peuple.

Pendant le III Reich

Eva braun en Dirndl
Eva Braun, la maîtresse d’Hitler s’est souvent laissée prendre en photo vêtue d’un dirndl

C’est à Gertrüd Pesendorfer, déléguée du Reich au travail sur les costumes traditionnels de 1939 à 1945 et directrice du pôle du costume traditionnel allemand de l’organisation politique féminine nationale-socialiste, que l’on devrait la version moderne de la Dirndl. Ce pôle du costume traditionnel allemand avait pour but «d’unifier une scène du costume traditionnel comprise jusqu’à l’Autriche au sein du Reich allemand»

On comprendra donc qu’après 1945, salie par la propagande nazie, elle tomba rapidement en désuétude. La tenue resta bien rangée au fond des armoires, même si ça et là quelques ateliers continuaient à le fabriquer en sur-mesure.

Les années 60 à 80

Les hôtesses des Jeux Olympiques de Munich en 1972
Les hôtesses des Jeux Olympiques de Munich en 1972. Bien qu’on parle de Dirndl, la tenue des hôtesses est bien revisitée et c’est surtout à cause du tablier que l’on peut parler de Dirndl.

Dans les années 60-70-80, d’après Gabriele Papke, responsable du service de presse, les jeunes allaient à la fête de la Bière en jean et en vêtement de ville. La dirndl était encore un peu portée par des serveuses. Lorsque la ville de Munich a été candidate pour les Jeux Olympiques, le service marketing eu l’idée d’envoyer de jolies jeunes filles vêtues de dirndl pour faire la promotion de l’art de vivre bavarois. Lors des Jeux Olympiques de 1972, 10500 hôtesses accueillirent les visiteurs internationaux revêtues d’un Dirndl bleu ciel. Cela contribua grandement à consolider la légende d’un vêtement traditionnel intemporel ainsi qu’à faire oublier la peu reluisante période du Troisième Reich.

2000, le renouveau de la dirndl

C’est dans les années 2000 que des jeunes ont commencé à acheter des costumes d’occasion. Ils les ont mélangé à des vêtements plus contemporains. Des stylistes se sont mis à créer, les médias et les industries ont suivi. Jusqu’à aujourd’hui, ce qui n’aurait pu être qu’une mode parmi d’autres devint un phénomène intéressant les même sciences humaines. La dirndl devient un classique de la garde-robe féminine. Certaines femmes en ont même plusieurs ce qui les incite à la porter aussi dans d’autres occasions.

dirndl-tablier-dentelleDépoussiérée par les créateurs, elle n’est plus considérée comme ringarde. C’est devenu un article de mode à part entière, sur lequel se répercutent les tendances de la mode. C’est devenu une sorte de phénomène de masse,  portée par tout le monde, quelque soit l’âge ou le niveau de revenus.

Un phénomène de société

A l’heure d’Internet, la Dirndl s’est encore plus démocratisée. On en trouve pour toutes les bourses, de quelques dizaines d’euros sur la toile (fabriquées en Chine ou au Pakistan), à plusieurs centaines d’euros chez les créateurs munichois. Elle n’est plus seulement portée dans les fêtes Elle part à la conquête de l’Allemagne non bavaroise. Il n’est pas rare de voir en France, des touristes autrichiennes ou allemandes la porter. Il lui arrive même de franchir le Rhin, portée par des non-germaniques dans les fêtes de la bière en Alsace….

Simone Egger, chercheuse à l’Institut du folklore et d’ethnologie européenne, à l’Université de Munich a publié en 2008 une étude sur la dirndl

Pour elle, c’est un phénomène de groupe, d’identification à un groupe. Il faut aussi prendre en compte le fait que plus d’un quart des Munichois viennent d’ailleurs. Beaucoup de gens viennent de l’étranger ou des autres Länder pour travailler à Munich, car la région est prospère sur le plan économique. Porter la Dirndl, c’est montrer qu’on fait partie de la ville, de la région, qu’on est content d’être ici sans forcément avoir des revendications régionalistes ou politiques.

Bavaroise verte et rouge en location à l'Atelier la colombe
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A l’Atelier la Colombe, nous proposons aussi quelques Dirndl pour vous accompagner aux fêtes de la bière…. Mais nous nous interrogeons depuis quelque temps: pourquoi revêtir un costume bavarois pour se rendre à une fête de la bière alsacienne ? Une tenue inspirée de nos costumes traditionnels si riches et si variés ne serait-elle pas plutôt de mise ?